#328 - decembre 2015

Les MENA et l’intérêt supérieur de l’enfant

un lien sous tension?

De mai à octobre 2015, le nombre de demandeurs d’asile est passé de 1708 dossiers à 4810 en six mois, selon Fedasil, l’Agence fédérale pour l’accueil des demandeurs d’asile. Parmi ces migrants, se niche une population particulièrement vulnérable : les mineurs étrangers non accompagnés (MENA). D’octobre 2014 à octobre 2015, nous sommes passés de 53 à 563 MENA (soit une augmentation de 963 % !) sur le territoire belge, selon le Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides. Des chiffres qui mènent à un constat alarmant. Fedasil ne cache pas que son réseau d’accueil est aujourd’hui saturé. Les places sont insuffisantes et les MENA les plus autonomes sont, par conséquent, dirigés vers des centres pour adultes. 

 

En même temps, les instances européennes ont pris position : l’intérêt supérieur de l’enfant doit être placé au centre des procédures. De plus en plus de mineurs à peine âgés de 8, 10 ou 12 ans posent pied à terre en Belgique. Mais comment prendre en compte l’intérêt supérieur des MENA si les pouvoirs publics ne s’en donnent pas les moyens ? 

 

Le problème n’est pourtant pas insoluble. Des recommandations concrètes existent pour protéger au mieux les MENA. Par exemple, stimuler les plus petites structures, articulées en centre d’accueil collectif où 15 jeunes habiteraient ensemble, ou bien encourager une prise en charge des MENA par des familles d’accueil. Tout l’enjeu consiste à ne pas reléguer au second plan l’intérêt supérieur de l’enfant, mais à le replacer au cœur des processus administratif et juridique tout au long du parcours, de l’accueil à l’intégration. Sans cela, nous courrons le risque de trouver des mineurs à la rue faute de structures adaptées pour les accueillir.

 

Ani Paitjan

SOMMAIRE

Les MENA et l’intérêt supérieur des enfants : un lien sous tension ?

Ani Paitjan

Déterminer l’intérêt supérieur de l’enfant en migration

Julie Lejeune

Personne ne conteste aujourd’hui que la qualité d’enfant prime sur celle de migrant: les droits de l’enfant migrant s’appliquent à tous, même aux enfants en situation de migration. En la matière, quelles sont les pistes de progrès à ce jour?

 

Les mineurs qui passent par Lampedusa

Germano Garatto

Les seize familles lampédusiennes qui ont demandé à pouvoir héberger des MENA ont dû suivre un parcours de formation spécifique pour remplir correctement ce rôle. Seules deux d’entre elles se sont vu confier un enfant étranger : un Marocain et un Ghanéen qui sont au lycée. Lampedusa n’est pas le but de la migration, ce n’est qu’une porte d’entrée en Europe.

 

Des recommandations pour mieux accueillir


Katja Fournier

MENA, voilà un terme très générique pour parler de ces enfants non accompagnés venant de l’étranger. C’est à la fois un terme qui leur donne une existence juridique et qui prévoit de la sorte un accès à tout un ensemble de droits. Mais c’est également un terme qui fait parfois oublier toute la diversité des histoires et parcours individuels.

 

“On ne se raconte jamais deux fois de la même manière”

Ani Paitjan

Mentor-Escale a fêté ses 20 printemps en septembre dernier. Deux décennies d’accompagnement des MENA. L’occasion ici de remettre en question l’accueil réservé aux plus vulnérables et de proposer des pistes sous l’œil acéré de l’anthropologue Jacinthe Mazzocchetti.

 

Les tuteurs : une loterie?

Nathalie Caprioli et Katja Fournier

Le tuteur est un acteur central pour garantir l’intérêt supérieur de l’enfant. Il porte de lourdes responsabilités. De ses compétences, mais aussi de sa motivation, peut dépendre l’avenir des pupilles. Une obligation de volonté, de moyens ou de résultat pour les tuteurs?

 

Clinique du lien

Juliette Leconte

Nombres de mineurs isolés étrangers sont très déconstruits lorsque je les rencontre, à Paris, très peu de temps après leur arrivée en France. Les symptômes, jusque-là contenus, jaillissent sans qu’ils ne puissent les retenir. Ils sortent alors de l’état de survie dans lesquels ils ont été plongés durant les évènements traumatiques qui les ont conduits à fuir leur pays ou durant le trajet d’exil.

 

18 ans, le tournant

Nathalie Caprioli

La responsabilité du tuteur cesse légalement à la majorité de son pupille. Du jour au lendemain, le jeune doit être capable de prendre son envol, de gérer son quotidien, de s’accrocher à ses études ou de bosser. Un cap abrupt! Que le désormais ex-tuteur peut aider à franchir, à défaut d’un accompagnement

Un (nouveau) dispositif…

Jonathan Unger et Barbara Herman

Le 22 octobre 2015, le Moniteur belge nous apprenait que deux bureaux d’accueil pour primo arrivants (BAPA) avaient été désignés. Ensemble, ces deux BAPA devront être en mesure d’accueillir annuellement 4 000 primo arrivants, définis par les textes comme les personnes étrangères séjournant légalement en Belgique depuis moins de trois ans et disposant d’un titre de séjour de plus de trois mois.

Violence de genre

Annalisa D’Aguanno

Créé en 1996, le GAMS (groupe pour l’abolition des mutilations génitales Belgique) propose entre autres un suivi psychologique individuel et des activités thérapeutiques de groupes. Il a accompagné des centaines de femmes dans leur parcours de reconstruction psychologique. Aujourd’hui, il partage ses expériences dans sa dernière publication “Femmes, excision et exil. Quel accompagnement thérapeutique possible?“.

Le Courrier hebdomadaire passe au numérique

En 56 ans d’existence, le Courrier hebdomadaire du Centre de recherche et d’information socio-politique (Crisp) en a fait du chemin! Cette année, il prend un tournant et devient accessible sous un format électronique.

Parcours d’intégration obligatoire, non peut-être…

Doit-on obliger les primo arrivants à suivre le parcours d’intégration ? En Wallonie, la réponse est claire, c’est oui. A Bruxelles l’idée fait son chemin. Le Centre Régional d’Appui à la Cohésion Sociale (CRAcs-CBAI) propose un temps de réflexion sur ce caractère obligatoire à travers une rencontre débat.